mardi 13 février 2007

Un lac dans mon rétroviseur...

Il fallait bien le faire un jour car c'était dans l'ordre des choses : ces pages ayant pour seule et unique ambition de relayer ma passion pour le genre « metal » se devait, tôt ou tard, de proposer une notule sur Tales From The Thousand Lakes. J'y ai souvent pensé, mais ces velléités ont toujours été anéanties par la flemme - et aussi la peur de « mal traiter » ce sujet qui me tient particulièrement à cœur. Et finalement... je ne le ferai pas ! Terrorizer s'en est chargé pour moi. Morceaux choisis de cet article signé José Carlos Santos, paru dans la rubrique « Blasts from the past : Terrorizer's guide to classic albums » de l'actuel numéro 154 dudit magazine. Une rubrique qui se divise immuablement en cinq points - une forme très scolaire rattrapée par un réel didactisme :

Pourquoi est-ce un classique ?

Assez conservateur dans son genre, Karelian Isthmus, le premier album d'Amorphis, recelait néanmoins les germes annonciateurs de la maestria à venir du groupe. Malgré ces indices, peu nombreux étaient ceux qui s'attendaient à une oeuvre de cette ampleur : Tales... s'imposa comme rien de moins qu'un hommage monumental à l'héritage culturel de la Finlande, basé sur la saga fondatrice de la nation - le Kalevala (...). Du death metal basique des débuts, Amorphis n'en retint qu'un canevas de base sur lequel le groupe réussit à peindre l'exact état d'esprit que nécessitait chaque chanson (...). Growls alternés avec le chant clair, passages doom mélancoliques se délitant en de délicates mélodies folk avant d'exploser en un climax brutal, tout se tient et est exécuté avec une technique instrumentale virtuose. « Lorsqu'on lui a joué les morceaux, Tomas Skogsberg, le producteur, nous a demandé si notre label était vraiment au courant de ce que nous faisions », se souvient avec humour Esa Holopainen (guitariste et principal compositeur). « Quand on a terminé l'album, on savait qu'on avait pondu quelque chose de spécial. Notre écriture commençait à trahir de nouvelles influences, nous ne savions pas du tout comment le label allait réagir, mais on avait vraiment confiance dans ces chansons » (...).

Quelles sont ses inspirations ?

Indiscutablement, le Kalevala. Chargé en émotions, créativement stimulant, le Kalevala est devenu une source d'inspiration sans fin pour Amorphis, ainsi qu'un véritable trademark. Pas seulement thématique, mais aussi musical : en incorporant un background ethno-folk en tant qu'ingrédient de base de sa musique, Amorphis s'est forgé une identité qui n'appartient à personne d'autre. Le kantele, instrument traditionnel finnois, sera d'ailleurs utilisé pour les albums suivants (...). « Le death metal était jusqu'alors très in-your-face, presque punk, et nous avons commencé à injecter beaucoup plus de mélodies dans tout ça. Nous nous sentions, en tant que musiciens, un peu à la croisée des chemins : de ce carrefour, nous avons suivi la route la moins évidente », poursuit Holopainen. Aussi importants que soient le Kalevala et le folklore pour Tales..., il ne faut pas oublier les influences du rock progressif : les claviers très vintage et les parties de guitares élaborées doivent beaucoup aux seventies, et notamment à Pink Floyd (et Deep Purple ! NdSheol).

Comment a-t-il été reçu à l'époque ?

« Toutes ces réactions nous ont vraiment prises au dépourvu », explique Holopainen. « On n'avait pas d'attentes particulières (...), et voilà que toutes ces critiques dithyrambiques de tous les canards de l'époque nous tombaient dessus » (NdSheol : la valeur n'attendant point le nombre des années, précisons que la moyenne d'âge se situait entre dix-sept et vingt ans). Non seulement Tales From The Thousand Lakes fut un énorme carton pour le groupe (...), mais aussi pour Relapse. Avec plus de cent-mille exemplaires écoulés à sa sortie, il demeure à ce jour le best-seller du label, l'élément qui fit de l'obscur Relapse le géant qu'il est aujourd'hui. Esa précise : « on a fini dans le Top 50 finlandais, ce qui est devenu quasi-systématique de nos jours avec nos groupes de metal... Ce n'était pas aussi évident en 1994 » (NdSheol : sans mentionner le fait que nous ne sommes pas, avec Tales..., au rayon sucreries, loin de là, c'est bien de death metal dont nous parlons !).

Quelle importance la jaquette a-t-elle eue ?

Peinte par Sylvain Bellamare d'après de vagues instructions données par le groupe (« en gros, on savait qu'on voulait du bleu, un lac et un marteau », révèle le guitariste), cette pochette demeure aujourd'hui l'une des plus évocatrices, l'une des plus fortes de l'histoire du metal moderne. Peu d'illustrations parviennent à rendre avec autant d'acuité l'âme de l'album qu'elles ornent, à refléter à ce point sa musique - et inversement (...). Simple question : depuis 1994, combien d'autres pochettes se sont « inspirées » de celle-ci ?

A quel point s'est-il révélé influent pour la scène ?

L'impact qu'a eu Tales... est énorme à plus d'un titre. Amorphis y gagna une stature mondiale (...) et le metal finlandais en bénéficia comme d'un coup d'envoi, un starter, et c'est ainsi que les échos de Tales... y sont clairement perceptibles un peu partout, de Children of Bodom à Moonsorrow en passant par Kalmah ou autre Norther (...). Par-dessus tout, Tales... défiait frontalement l'orthodoxie du death metal et a ouvert la voie de l'exploration ethnique à un nombre incalculable de formations. Ce fut, finalement, l'un des fers-de-lance du mouvement de redéfinition artistique du genre, dans le milieu des 90's, aux côtés d'Opeth ou d'Arcturus. Un mouvement qui ouvrit les vannes à de nouvelles influences, atypiques, amenées par des artistes toujours plus créatifs.

(José Carlos Santos, traduction commentée de votre serviteur)

Que dire de plus ? Un article globalement juste, rendant bien compte de l'impact énorme de cet album en son temps. En revanche l'aspect folk, « ethnique » même, de l'affaire, me parait un peu exagéré ou du moins prématuré : ce n'est réellement qu'à partir du fabuleux Elegy (1996, Nuclear Blast) qu'Amorphis laissa parler le côté folk qui sommeillait en lui. Concernant l'influence de Tales From The Thousand Lakes sur ses compatriotes, elle est plus tangible que jamais, et j'y rajouterai les noms d'Insomnium, de Searing Meadow, d'Ensiferum... Un album fondateur et indispensable au même titre, toutes proportions gardées, que n'importe quelle galette de Metallica, de Maiden ou de Priest. Petite précision concernant la fin de l'article : attention à ne pas oublier les discrets mais géniaux In The Woods, largement aussi aventureux et avant-gardistes qu'Opeth et Arcturus ! Dernière chose, il faut bien comprendre que l'aspect folk d'Amorphis est tout sauf « gadget », personnellement mettre en avant ce type de particularité me fait plutôt fuir tant la scène folk est boursouflée aujourd'hui... Point question ici de guignols foutant de l'accordéon n'importe comment et n'importe où pour le simple plaisir de pouvoir l'écrire dans le livret - d'ailleurs y'a jamais eu d'accordéon chez les Amorphes ! Avant tout, avant même d'être un groupe de metal, Amorphis est juste un monstrueux groupe de rock, que l'amour du Kalevala n'empêche pas de reprendre du Hawkwind ou du Doors à l'occasion.

As you faithful reader already know, I love Amorphis’ Tales From the Thousand Lakes to death. Distinguished monthly metal compendium Terrorizer features a lengthy article about it in its current issue. I must say José Carlos Santos did a pretty good job here and I allowed myself to quote some of his prose. In French, yup. And if you’re lost in translation, well – read it in its extensive form and original language in issue #154 of said magazine. Either way, listen to Tales From the Thousand Lakes : each time you do it, you’re saving ten fuckin’ baby seals. Oh, you didn’t knew it ?

Le site et le Myspace d'Amorphis.

...et toujours :
Amorphis emmerde Darwin...
La fin de l'éclipse ?

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