jeudi 24 janvier 2008

To Protect And To Slay

On a tous, dans cet immense chaos néanmoins systémique, constitué des différentes écoles métallurgiques, nos petits chouchous. Ces groupes un peu moins connus, un peu moins cités et donc synonymes, dans nos petites caboches, d'injustice du siècle. Oui, celui-là par exemple, qui est aussi important pour toi qu'anecdotique pour moi. Vous voyez l'idée. J'en ai plusieurs, mais me contenterai aujourd'hui de mettre sur la table de dissection le cadavre - refroidi depuis quelques éons - de Protector. Un combo né, comme tous ses confrères allemands, dans une MJC vert-de-gris (merveilleux pays) et qui frappe fort dès son patronyme. Protector ; il faut reconnaître que ça claque comme doit claquer celui de tout bon défenseur de la foi. Probablement trouvé pendant le cours d'anglais, il va sans dire - après tout, le logo a bien été dessiné pendant le cours de maths. L'école allemande ? Un vrai bienfait pour le metal (tu trouves le nom de ton groupe le matin et t'enregistres ta première démo l'après-midi dans la MJC sus-citée. Le jeu ? On verra ensuite, on a dit qu'on faisait du metal) !

Plusieurs raisons alimentent mon amour pour Protector, mais ce qui demeure pour moi son principal attrait et son unicité, c'est l'inexorable dévastation de son thrash-death slayerien, et surtout cette mise en place complètement américaine à partir de Golem. Oui, Protector est éminemment brutal, oui, Protector bastonne avec une efficacité toute germanique, et oui, mille fois oui, Protector est crade et roots comme tout brûlot de thrash européen de l'époque qui se respectait. Oui, mais Protector demeure carré et plus précis que n'importe lequel de ses frères d'armes, à l'exception notable du Kreator post-Coma. Et à l'inverse de la bande à Mille, Protector n'a pas perdu, en contrepartie de cette mécanique de haute précision, sa part la moins avouable : celle du diable. Bien sûr j'adore Sodom, Kreator plus que tout, Destruction, Assassin et tous les grands noms du thrash teuton (qui a aussi ses moins grands, qui se souvient des horribles Poltergeist ?), mais Protector demeure mon petit... protégé. Plus de densité, plus d'embardées vers le death, un penchant notable et pas encore si courant pour truffer ses morceaux de passages mid-tempo ravageurs, et donc ce côté « horlogerie suisse » qui n'était pas, loin s'en faut quand on parle du thrash ultra-rhénan des années 80, une option standardisée... Il faudra en effet attendre des influences aussi énormes que celle d'un Morbid Angel ou d'un Cannibal Corpse pour que quelques tours de clé soient donnés aux charmantes approximations procédant des Possessed, Hellhammer et autres Venom.

A Shedding of Skin, tuerie à la bestialité inégalée sur laquelle tous les démons de la terre semblent rugir par le gosier de Wiebel, reste pour moi l'album le plus marquant. Une fois terminée son intro arpèges/bruitages bucoliques très tiamatesque, déboule une quarantaine de minutes de folie furieuse, flirtant régulièrement avec le black metal lorsque tous les potards sont à onze... Whom Gods Destroy (c'est pas metal ça comme titre ?), Mortuary Nightmare et Retribution In Darkness demeureront les hymnes les plus puissants du Protectorat mais tout le reste est à l'avenant. L'incontournable instrumental, passage obligé de tout grand disque thrash, est présent sous le nom de Necropolis. Un album « no fillers, just killers ». La production âpre et crunchy de Harris John (quelle surprise...) et la pochette du futur célèbre Joachim Luetke parachèvent un chef-d'œuvre... qui ne doit cependant pas éclipser le reste de la discographie du groupe - en particulier le très misanthropique premier mini. Cependant le talent ne fait pas tout et A Shedding of Skin, prétendant au trône obsédé par la cruauté musicale, ne parvînt pas à s'imposer commercialement en cette année 1991 déjà surchargée en la matière. Rien n'avait commencé... que tout était déjà fini !


Que retenir du groupe aujourd'hui ? Simplement que l'extrême agression du blackened-thrash teuton (abreuvé directement à la source du Styx, à l'instar de son frérot sud-américain), la précision virtuose du death metal made in Tampa (confere les faux airs canniboulesques du morceau A Shedding...) et l'énergie des thrasheurs de la Bay Area, à l'instar de Calgon 3 en 1, ça existait... et ça se trouvait chez Protector. Aujourd'hui Hansi Müller et Olly Wiebel sont retirés de la scène et travaillent dans l'usine locale des Voitures du Peuple (ou comment le metal peut changer votre destin... ou pas !), Michael Hasse ne risque pas de revenir de là où il est, et seul le sympathique Martin Missy maintient une timide flamme au moyen d'un groupe-hommage, The Protectors, et d'une page web très documentée qui n'intéresse que les pelés dans mon genre. Le golem est inerte, mais ses enfants sont légion : Urm est toujours fou et hurle sa superbe schizophrénie thrash / death au détour des riffs d'un Blood Red Throne, pour n'en citer qu'un. Sa campagne est terminée depuis bien longtemps, alors que le Protectorat repose en paix sans sombrer dans un bien irrespectueux oubli.

Wow, man, do I love fuckin’ Protector. I can’t believe how this metallic german war machine is forgotten by all nowadays – fuck it, they were true defenders of the faith, absolutely flawless throughout their career, and yet we’re still talkin’ about fuckin’ Tankard. Go figure ! So yeah, I wholeheartedly confess my unconditional love for the Protectorate’ slayerian thrash death metal attack. Brutal as fuck and as mercilessly nailed as Jesus was on the cross, deadly precise (the american way !) while retaining the savageness of the German thrash metal acts, what more can you wish for ? Inexorable devastation, yup, that’s what Protector had to offer and be sure that two decades later it will still blow you far, far away. I’m particularly fond of A Shedding of Skin, a nasty motherfucker released in Holy Metal Year 1991, A.D. Olly Wiebel really screams his guts out on this one ! Just listen to Whom Gods Destroy (can a song’s name get more metal than that for fuck’s sake ?), Mortuary Nightmare or Retribution In Darkness, then suffer and obey your new masters… Unfortunately A Shedding of Skin failed to reach its audience and the mighty Protector began to fall from metal grace. A real letdown for these talented musicians – please keep the oriflamme of the once powerful Protectorate burning high and bright : their doing shall not be buried by time and dust !

A Shedding Of Skin (Major Records, 1991)

01 Intro
02 Mortuary Nightmare
03 A Shedding of Skin
04 Face Fear
05 Retribution In Darkness
06 Doomed To Failure
07 Thy Will Be Done
08 Whom Gods Destroy
09 Necropolis
10 Tantalus
11 Death Comes Soon
12 Unleashed Terror
13 Toward Destruction

Le
mausolée-Myspace (malheureusement aucun morceau de A Shedding of Skin, album déjà hors-canal historique suite au départ, pour cause d'agoraphobie, de Martin Missy) de Protector.


Le
Myspace de The Protectors, groupe-hommage emmené par ledit Missy.

jeudi 17 janvier 2008

Ad Hominem

Cela faisait un moment que je l'avais dans le collimateur. Bref, n'achetez pas, n'ouvrez pas, ne regardez pas même ce pseudo bouquin écrit avec des moufles et relu par... relu par qui au fait ? Personne, évidemment. Hard Rock, du très parisiano-parisianiste Christian Eudeline, est d'une absolue bêtise dont la vacuité stylistique, indigente au point d'atteindre l'indicible*, n'a d'égale que l'immense, la cyclopéenne, l'étourdissante méconnaissance de son sujet. Cher Christian, retourne écrire pour la bible musicale des bobos-gauchos-intellos (à moins que ce ne soit Patrick), mais par pitié, putain, laisse notre chapelle tranquille. Merci.

Je n'ai pas envie d'argumenter, et je vous renvoie seulement à cette exécution signée Shreut et parue dans l'excellent 80's French Heavy Metal. Ok, chacun est libre d'écrire ce qu'il veut, et si Eudeline nous assène que Vulcain n'a sorti qu'un seul album, nommé L'agression, et nous explique que Slayer est un groupe de fafs qui ont décidé un soir de biture de se raser la tête (bientôt à la Star Rac ?), c'est son droit. Je suis très américain en ce qui concerne la liberté d'expression... Mais là où ça ne passe plus, c'est que cet « ouvrage », torché à point nommé avant les fêtes, n'a pour très claire vocation première que de ramasser le pognon sur le dos de grand-mères larguées (mais certainement moins que l'auteur) qui pensent faire plaisir à leur petite-progéniture chevelue. Arnaque éhontée, à chier et en conséquence de quoi... aux chiottes !

Je reprends l'un des commentaires de la chronique sus-citée pour conclure : « Une véritable m**de hautaine, qui ne s'intéresse qu'aux morts, aux suicides, aux accidents et aux chambres d'hôtel dévastées ». Et dont « l'auteur » ne s'encombre ni de vérité à l'endroit des faits, ni de dignité envers lui-même, rajouterai-je.

* « les guitares de Slash déchirent leurs races ». Ouais super, retourne apprendre à écrire, tâcheron inculte, on n'est pas dans le 9-3 ni à Canal ici...

Man, there’re so many ignorant fucktards writing ‘bout heavy metal lately. Ya can’t read heavy metal – ya just can live it and hear it. This does not apply to biographies, especially when written by Nikki Sixx.

jeudi 3 janvier 2008

Album ou le repos du guerrier

Comme tout véritable artiste Quorthon était multiple - et ses différents visages musicaux ont d'ailleurs réussi à estomper l'homme : le fils prodigue de Black Mark - peut-être pas qu'au figuré - reste mystérieux et la mort qu'il n'eut de cesse de célébrer (en occultiste dans ses premiers albums ; en viking tombé au champ d'honneur dans les derniers) l'aura pris au mot avec beaucoup d'avance. Et nul ne lira donc jamais son projet de livre sur Bathory. C'est peut-être pas plus mal - qui a envie de savoir que le Heavenshore Studio n'était qu'un garage perdu dans une friche industrielle de Stockholm, ou que les vocaux d'un des plus influents volumes du metal extrême ont été enregistrés dans des toilettes entre deux vrombissements de tondeuse à gazon ? Quorthon n'était pas moins fan de hockey sur glace que de mythologie scandinave (où l'on apprendra que le titre Blood On Ice revêt un tout autre sens que celui communément supposé), et savait se détacher, pour ne pas en être prisonnier, de son principal travail musical pour embrasser d'autres horizons.

Album, sorti en 1994 sous la bannière Quorthon, est un disque moyen car malheureusement alourdi d'une médiocre et redondante seconde moitié. C'est dommage : les cinq premiers morceaux sont excellents et dépaysent franchement le fan de Bathory... sans jamais le perdre totalement en route. C'est ainsi qu'après les très pop-punk No More and Never Again et Oh No No, l'auditeur se voit rattrapé in extremis par le fond de sa peau d'ours par un très atmosphérique Boy, l'un des points d'orgue du disque. Quorthon, certainement très marqué par ce qu'il se passait dans cette première moitié des années quatre-vingt dix, laisse plus qu'entrevoir ses multiples influences : dire que les ombres d'Alice In Chains, de Stone Temple Pilots et même de Soundgarden planent sur Album est doux euphémisme... L'auditeur moyennement averti, peu familier du timbre de voix d'un Jerry Cantrell ou (surtout !) d'un Layne Staley, tomberait presque dans le panneau. Ce heavy-rock lascif et terreux, mieux produit que n'importe quel Bathory (ce qui ne signifie pas bien produit) garde pourtant l'énergie punk qui n'a jamais quitté Quorthon (One-Eyed Old Man, du viking metal, vous êtes vraiment sûr ?). Attention cependant : pas de cavalcades effrénées ici, le mid tempo est roi et Album ne contient aucun morceau rapide - pas un seul.

Album n'est pas un très bon disque de Quorthon, il n'est pas, non plus, un très bon disque tout court. Mais l'indéniable patte de son illustre géniteur fait qu'il revêt un intérêt pour certains - et sa très honorable première partie (c'était plus simple de dire face A !) vaut amplement le prix dérisoire, presque insultant, auquel on peut le trouver aujourd'hui. Sans oublier le fait qu'au royaume des aveugles (pour faire, si j'osais, un « clin d'œil » au One-Eyed Old Man sus-cité), les borgnes sont rois : Album vaut, malgré tout, mieux que la majorité de la merde même plus réchauffée qu'on nous sert aujourd'hui en guise de « rock ».

Quorthon was a man of many faces, and not only a musician – death reaped him while he was penning Bathory’s biography. I don’t really mind never reading it ‘cause who wants to dispel Bathory’s lore by learning about lawnmowers noises in its oeuvre ? What I do know though is that Album, released under the moniker Quorthon, is an interesting disc for any true Bathory lover. Sure this is not a great work by Bathory’ standards, and this is not “muscular” enough to appeal your typical pagan-viking metal fan. However, you’ll find here good tracks such as No More and Never Again, Oh No No (yup, just like a fuckin’ lemming about to explode – if you get that one you’re the man !), and you’ll be struck by the extreme Bathory mood of Boy, a sad, beautiful song about being a lonely boy having a hard time in school and childhood (or whatever the fuck you want ‘cause this is just my interpretation). Album is atmospheric, displaying a once-modern blend of heavy rock sometimes leaning on a droning Alice In Chains. Not a classic by all means, but one to know. Or so I think, and so you shall : this is way better than the average catshit called “rock music” we’re currently force-fed with on the radio or the TV.

Album (Black Mark Production, 1994)

01 No More and Never Again
02 Oh No No
03 Boy
04 Major Snooze
05 Too Little Much Too Late
06 Crack in My Mirror
07 Rain
08 Feather
09 Relief
10 Head Over Heels


Le Myspace de Bathory.