vendredi 22 mai 2009

Ça va mieux en le lisant

Photo Antonio Melão. Primordial à Corroios, Portugal.

J'ai toujours adoré lire les interviews, les vraies, bonnes et longues (!). Je suis capable de passer une après-midi sur le net pour rechercher ce qu'avait à dire Luc Lemay sur Considered Dead en 1991, et j'en suis fier. Mes clients préférés sont, ont toujours été, Lemmy Kilmister, Mika Lutinnen et Pete Steele : les lire, c'est s'administrer une dose de prozac journalistique. Récemment et dans une autre veine, pas forcément humoristique celle-ci, ce sont les dires de Alan « Nemtheanga » Averill et Doc Coyle qui m'ont ravi.

Nemtheanga, fier gallois de la tribu Primordial, remet ainsi quelques pendules à l'heure et notamment au sujet de la façon dont le groupe se perçoit et doit être entendu : « I never wanted to be one of those fantastical history-lesson bands. I'm not interested in singing songs about mythical wars (...). I always wanted to say something about the modern world (...). I'd be ashamed that we lived in this day and culture and didn't try to say anything about it ». Après les inepties d'un Rhapsody, un tel discours n'est même plus salvateur, mais essentiel. Je ne suis pas un dingue de Primordial, je trouve que le dernier album est passé de peu à côté de son sujet, mais ce groupe a toujours eu quelque chose. Son folk metal, noirci au charbon des prolos gallois, n'a jamais perdu de vue qu'il devait rester avant tout sombre, inexorable et tragique (l'école britannique tendance Music For Nations, donc). Primordial possède un potentiel rare qui ne s'exprime pas à tous les coups - mais quand c'est réussi, c'est imparable.

Second métallurgiste me réconciliant avec l'espèce humaine parfois désespérante, Doc Coyle, pourtant des affreux God Forbid, lâche quelques mots au sujet du meilleur morceau sorti en 2008 ; Broken, Beat & Scarred. Le bougre m'ôte les mots de la bouche : « the catchiest, grooviest, headbangingest (sic) song Metallica have written since Sad But True ». Bien vu, bien dit, et tout à fait d'accord pour l'analogie plus qu'évidente avec Sad But True. Ne me reste plus qu'à préciser que Nemtheanga est à lire chez Vue Weekly ; quant à Doc Coyle, c'est dans l'actuel numéro de Terrorizer (#183) qu'on retrouvera sa sainte parole. Amen.

Let’s hear some words of wisdom, for a change… : "I never wanted to be one of those fantastical history-lesson bands. I'm not interested in singing songs about mythical wars (...). I always wanted to say something about the modern world (...). I'd be ashamed that we lived in this day and culture and didn't try to say anything about it" (Nemtheanga, working-class hero currently holding the mic in Primordial. I wonder what he thinks of fucking Rhapsody Of The Fucking Fire). Shall we go on ? Ok, Doc Coyle’s turn (of God Forbid fame) : "Broken, Beat & Scarred is the catchiest, grooviest, headbangingest song Metallica have written since Sad But True". You’re so fuckin’ right, Doc. That won’t make me love your horrible band, but you’re so-fucking-right. Oh my gawd.

mercredi 20 mai 2009

Un passé qui ne passe pas

Signe des temps pas fameux ? Avatar du phénomène gloubiboulga appliqué au metal, pourtant déjà assez régressif pour ne pas en rajouter une louche ? Ou triste constat symptomatique d'une vérité : la scène serait si chiante en ce moment, qu'entre deux productions formatées chez Andy Schnaps et trois pochettes photoshoppées montrant un putain de marmot sous un ciel apocalyptique (This Godless Endeavour aura fait quelques émules), rien ne serait meilleur que de se réfugier dans ce que l'on sait être toujours aussi bon - et je ne parle pas de votre copine ? Toujours est-il que la dernière mode est à l'exécution intégrale de Ton Album Culte sur scène. Après Slayer et Reign In Blood, Metallica et Master Of Puppets, Mötley Crüe et Dr. Feelgood, et quelques autres que j'oublie, c'est Aerosmith, Judas Priest et Forbidden qui « menacent » de jouer intégralement et respectivement Toys in the Attic, British Steel et le grand Twisted Into Form pendant leurs prochaines tournées. Quant à Testament, c'est par le biais d'un sondage que leurs légions d'héritiers (réfléchissez, ce n'est pas dur) sont appelés à entériner une setlist exhumée de The Legacy et The New Order.

Pas bien convaincu par ce genre d'initiatives, un peu du même tonneau que cette pénible mode qui voit de vieilles gloires ré-enregistrer leurs vieux tubes (chez Andy Schnaps)... En sus d'être un concept assez réducteur et limité, ça laisse perplexe sur l'état actuel - notamment économique - du metal et de ses amateurs bien sûr. Le message n'est pas des meilleurs non plus pour les artistes qui peuvent apparaître comme figés dans une époque et dépendant d'un public purement générationnel... alors que le metal est sensé être l'exact contraire du conservatisme. Personnellement j'échange largement un Angel of Death contre un Flesh Storm. Quoi qu'il en soit, Ton Album Culte joué en entier est certes un bon filon, mais finalement, si peu flatteur. Bien sûr, je me dédierai sans sourciller quand Guns tournera à cinq pour jouer tout Appetite For Destruction, mais ça me paraît peu probable, je soupçonne Steven d'être mort depuis quelques temps - simplement mû par quelque nécromancie le temps de ces occasionnelles téléréalités dans lesquelles il s'exhibe.

It’s a shame, but it seems the latest trend is seeing all our "vieilles gloires" of yore touring in its entirety their cult album. Talkin' 'bout the cash machine... Take Slayer, for example. Ok, I like Reign In Blood as much as you but I won’t mind them playing fuckin’ World Painted Blood from alpha to omega, ‘cause World Painted Blood is the decade’s utmost destructive thrasher coming from this side of the Atlantic (which is the left side for me, remember ? I eat bread every day). Alas, metal these days is plagued with conservatism – thinking of it, another common point with ol’ good Sheol.

mardi 5 mai 2009

Praeclarum Custodem Ovium Lupum


Photo par Mark Coatsworth

Dead Shape FigureTurisasMoonspell et Cradle of Filth. C'était l'autre soir, du côté de chez votre serviteur, et ça valait le coup. Je n'étais venu que pour les loups, ayant réintégré le troupeau voici quelques années... Ribeiro en bon maître de cérémonie a su se mettre un public très jeune, Cradle of Filth oblige, dans la poche dès Finisterra : Moonspell put dès lors se livrer à une interprétation passionnée de ses classiques récents. Quelques inévitables furent cependant de rigueur, et on aura apprécié la théâtralité de Ribeiro sur Vampiria et sa mythique résolution - ce hurlement féminin strident, auquel le chanteur prête une gestuelle dramatique.

On peut jouer au jeu des matriochkas : je n'étais venu que pour Moonspell. Mais si j'osais, je dirais que je n'étais là, en vérité, que pour entendre Alma Mater, hymne incontournable du dark metal et assurément mon morceau favori du groupe. Cette objectivation de l'âme lusitanienne de Moonspell fut délivrée dans une version dantesque, faisant honneur à toutes ses subtilités... Notamment cette dégradation vocale, à partir de At the moon mountain..., faisant dégringoler la chanson vers un black metal tellurique et païen comme jamais plus Moonspell n'en a fait. Fernando Ribeiro et Pedro Paixão ? Oh non, à cet instant, c'était bien Langsuyar et Neophytus que je voyais... Alma Mater (mal à ma Terre ?) résonna comme une incantation oubliée et interdite, avant de mourir comme la lune aux premières laudes*. Moonspell se laissa aller au tragique d'un Full Moon Madness - véritable Spleen du Loup-Garou - avant de quitter enfin une salle hérissée d'une marée de mano cornuta.

« Ahhh... the children of the night... What a sweet music they make... ». C'est sur cet emprunt à Bram Stoker, éructé d'une voix en provenance directe du trente-sixième dessous des géhennes, que Dani Filth et ses musiciens investissent la scène : une autre histoire qui, bien que beaucoup plus plaisante que ce que j'en attendais, m'a moins intéressée que la précédente. Je ne la raconterai donc pas : lorsque la lune est pleine, on ne voit qu'elle dans le ciel nocturne.

* Laurent Michelland, sort de ce corps !

Portugal once ruled the world, by making itself master of the seven seas... Well, some of its natives still rule my world. Tonight I attended a Moonspell gig, catching 'em on their Night Eternal tour. Well, to say it was worth it is an understatement - from Ribeiro's commanding presence to the exigent setlist, everything as a whole was a must-see, must-hear. Stuck between some skin-bearing, fiddler-wielding folkish fuckers and a bunch of tired vampires, the southern wolves totally stole the show, concluding on a mass-murdering rendition of their best tunes ever : Alma Mater and Full Moon Madness. Aooowww !