mercredi 22 décembre 2010

Stade terminal pour 2010

Qu’on le veuille ou non le metal, musique populaire au sens premier du terme, est fortement marqué par, sinon teinté de christianisme – un fait avéré à chaque Noël. Il suffit de constater année après année les conneries d’initiatives genre « Rob Halford Chante Le Père Noël » (cette année je crois que c’est Udo qui s’y colle), ou de remarquer dans les bacs le énième album du Trans-Siberian Orchestra concurrençant Jack Lantier sur ses terres. J’avais moi-même pensé à mettre à l’occasion de chaque dimanche de l’Avent une notule anecdotique relative à cette célébration – en commençant par cette interview nostalgique du Priest narrant comment le groupe, dans ses débuts fauchés, avait arrêté son tour-bus minable en pleine autoroute pour aller couper un sapin aperçu derrière la bande d’arrêt d’urgence, tout miteux et grisé par les dépôts de gaz d’échappement. Cet arbre une fois décoré – on ne sait comment - avait permis aux musiciens de se réchauffer un peu le cœur (toujours utile, à la veille de conquérir le monde). Mais bref, je n’ai pas eu le temps de faire ces quatre articles et on se contentera donc d’un petit récapitulatif d’une autrement triste année (Dio, Steele, Palomäki…).

Artistiquement et selon votre serviteur 2010 a été écrasé par deux albums ayant explosé à vue toute concurrence. Triptykon d’abord ; Eparistera Daimones couronnant un come back (Tom G. Fischer) comme on en a peu vu depuis celui de De Gaulle en cinquante-huit. Plus que la survivance d’un Celtic Frost, Tritptykon est avant tout la troisième incarnation de Hellhammer et le capitaine de ce corbillard sonique prouve que tout le pouvoir créateur de ses précédents groupes lui appartenait – à lui seul. En revanche je suis beaucoup plus circonspect sur l’EP « de compagnonnage » paru récemment et espère que cela ne deviendra pas un gimmick commercial puisqu’une telle sortie était déjà prévue pour compléter (sic) Monotheist. La seconde sortie de l’année, c’est bien sûr l’extraordinaire Lawless Darkness de Watain, où comment ouvrager un black metal hautement esthétisant sans lui concéder cette odeur d’humus de cimetière, ni la laideur contrefaite originale de cette musique – un paradoxe donc comme l’est tout grand album de black metal. Et quelle violence mes aïeux ! Violence dont la bonne production n’est pas la seule responsable (cache-misère trop fréquent), non, ce sont bien les compositions qui « élèvent » Watain à ce nouveau degré d’extrémisme.

Voilà pour 2010 – vous noterez l’implémentation sur cette nouvelle formule d’un lecteur de musique qui devrait, à l’heure où j’écris, fonctionner un peu mieux que l’estomac de Bret Michaels.

Wow, is 2010 already gone ? Almost it seems – and what a short year it was, wasn’t it ? It was also a sad one, punctuated by multiple “departures from the mortal”, as Marduk would put it. Ah, let’s get away with it – spirit of the dead outlives memories of the mortal. Artistically speaking 2010 will be remembered, that’s for sure, as Triptykon and Watain both have released critically acclaimed, astonishing works of fury and hell in Eparistera Daimones and Lawless Darkness : occult and heavy as fuck will be my last comment on these. Ya have to read French for more ! Bye bye, so long.

jeudi 14 octobre 2010

Folk You ! (redux)


Je ne connais pas Hammers Of Misfortune, je sais simplement que j'en aime le patronyme et l'esthétique de leurs pochettes. Et les propos de son principal compositeur, John Cobbett, qui font écho à ceux de Martin Walkyier déjà mentionnés dans une précédente notule. En clair, il est probable que rapidement la petite intégrale de ce groupe trône sur mes états plus ou moins gérés, entre Guns N' Roses et Hand Of Doom. Lu donc, dans le dernier Terrorizer (et où d'autre, d'abord ?) : « on fait tous des jobs de merde, donc on fait du heavy metal prolétarien. Une fois qu'on en a fini avec la journée, faudra m'expliquer comment passer mille ans sur Pro-Tools, à chanter sur des sorciers cosmiques (...). Le metal c'est du folk, du folk pour le prolétariat : des gens qui se sentent bien en écoutant cette musique, qui les soulage et les aide dans le combat de tous les jours qu'est la vie, et j'en fais partie ».

Travailleuses, travailleurs, je vous exhorte maintenant à réécouter Progressive Proletarians de Kreator et à descendre dans la rue avec votre plus beau T-Shirt Répression dans l'Hexagone. Sera toléré aussi le désormais vintage We Are The Damned Of The World de Megadeth.


"I always say we play heavy metal. If I could call it something else it would be working class progressive metal because we all work at shitty jobs, shops, bars. The only time we can make music is after we're done with work, so really how can you go spend a month editing everything you play into Pro-Tools, having stellar perfected leads and sing about whizzing through the stars with some space wizard, really? It just doesn't work (...). Metal is folk music. Even if it doesn't sound like it, metal is folk music for lower working class people. The people that need this music are the people who feel powerless. It makes them feel better about themselves to listen to this incredibly powerful, grandiose music ; because the chances are, these people are struggling, and they could use this empowerment. I am no exception" (John Cobbett, from the Hammers Of Misfortune).

Le site et le Myspace de Hammers Of Misfortune.


...et toujours :
Folk You !

samedi 2 octobre 2010

Très pêche


A la pêche aux mou-les, mou-les, mou-les, j'ai ramené un vieux brochet. Nous avons mordu tous les deux : lui avec ses dents, parce qu'il sait encore se faire agressif, et moi à l'hameçon, parce que je n'ai pas su lui résister. En un mot, Magic & Mayhem - Tales From The Early Years est un réenregistrement des vieux classiques d'Amorphis - seuls les trois premiers albums sont concernés.

Avis rapide et bâclé : au-delà de l'attrape-nigaud évident (et je suis un nigaud), c'est comme Jean Rochefort ou Jean-Pierre Marielle. C'est tout vieux, mais c'est tout bien et c'est tout classieux. Amorphis, quoi. Et puis, merde quoi, faire oublier comme ça Pasi Koskinen et son timbre pourtant unique, c'est un tour de force à la limite du tour de magie.

Well, for fuck's sake, can someone tell me why the fuck is Amorphis re-recording its early, yet mighty hymns ? I dunno, I just don't get it. Let's say this is a money-grabbin' move, which isn't exactly a surprise coming from Nuke Blast. However I have to mention that Joutsen's cavernous delivery is astonishing and that I, once again, willingly gave my hard-earned bucks to these Finnish motherfuckin' motherfuckers. Worship and obey !

Magic & Mayhem - Tales From The Early Years (Century Media, 2010)

01 Magic And Mayhem
02 Vulgar Necrolatry
03 Into Hiding
04 Black Winter Day
05 On Rich And Poor
06 Exile Of The Sons Of Uisliu
07 The Castaway
08 Song Of The Troubled One
09 Sign From The North Side
10 Drowned Maid
11 Against Widows
12 My Kantele
13 Light My Fire

Le
site et le Myspace d'Amorphis.

...et toujours :

Le retour des fils d'Uisliu
Un lac dans mon rétroviseur...

Amorphis emmerde Darwin...

La fin de l'éclipse ?

mardi 31 août 2010

Pensées pour moi-même


Bien... Les Notules sont peu actualisées en ce moment : mer d'huile, telle est la météo plus ou moins constante sur cet océan binaire. Ce qui signifie a contrario que je suis fort occupé actuellement - d'ailleurs cette notule voit le jour depuis une chambre d'hôtel et ma Nintendo DS ! Mais assez avec la vie privée, la seule et unique ligne éditoriale des Notules étant la musique et rien d'autre. Vous savez que le vieux Sheol mange, bois, dors metal - c'est bien suffisant et c'est tout ce qui compte ici (-bas ?).

En bref, quelques news, vite fait mal fait : le dernier Maiden est sorti, et il est mokkori - un très bon album donc, allant, comme d'habitude depuis Brave New World, de son train de sénateur que l'on ne bouscule plus. Les morceaux sont très, sinon trop longs, et Bruce s'époumone sur ces refrains rachitiques répétés jusqu'à plus soif... mais The Final Frontier parvient à rester plus « frais » que nombre de premiers albums à l'affiche actuellement. Un comble pour nos papys anglais ! Moins bon que cette cinquième évangile qu'était AMOLAD, que j'écoute religieusement avant chaque repas (c'est long, d'ailleurs ; je fais peine à voir), mais enfin, c'est un Maiden : le premier qui n'aime pas peut sortir car il a tort, de toute éternité et pour toujours. Amen, up the irons et ne parlons plus de la Guerre de Cent Ans.

Lue, la bio de Dave Mustaine (Mustaine : A Life In Metal). Sympa, écrite avec le cul mais on s'en fout, et bourrée d'anecdotes qui raviront tous ceux qui, comme moi, sont des fidèles du bonhomme et de son œuvre - car moins que jamais, on a envie de dire « groupe » après avoir fermé ce bouquin. J'ai notamment retenu le passage croustillant concernant l'épisode Rotting Christ / Dissection, raconté par le menu par Dave... L'histoire du 'Deth est tumultueuse et dessine une fois de plus en filigrane cette terrible fêlure que fut l'éjection d'un Metallica à la veille de sa gloire - un traumatisme ayant généré, je le crois, un immense symptôme abandonnique qui peut éclairer tout autrement l'histoire de Mustaine et notamment sa relation avec « ses » musiciens ! Pas sûr cependant que Dave sorte grandi de ces pages qui souffrent d'une autosuffisance mal camouflée par un excès de fausse modestie. Tom G. Warrior, au moins, n'essaie même pas... Ceci n'empêche pas Megadeth d'être suprême dans sa partie, ni Hangar 18 d'être régulièrement ma chanson de chevet depuis - déjà - 19 ans. A bientôt, ou à plus tard.

OK – if you want it, you’ll bloody get it ! First and foremost, let me start with fuckin’ Maiden : The Final Frontier is out, and worth your money. Up the hammers, etc etc etc. Ok, let me be an asshole : I may not be such a huge fan as I used to be, and I’m particularly tired of one of Maiden’s trademarks : the singable choruses where one sentence (usually the song’s title) is repeated ad nauseam – but still, the guys can deliver the goods. Not nearly as good as AMOLAD though. Alright, let’s proceed with Mustaine’s newly released autobiography (Mustaine : A Life In Metal). Every deth’ead should give it a try – but if not a fan, don’t even think about it. I am, and I have to say that Dave’s account of you-know-what is honestly told. But hey, the guy is a bit too egotistical for my tastes and it really transpires at every chapter – love him though. So Mustaine : A Life In Metal may not be a real pageturner such as the gunners’ bios (already read Slash’s and Steven’s, eagerly waiting for Duff’s) but I appreciated it. Too bad the blowjobs weren’t included.

...et toujours :
Considérations théologiques
Sick & Destroyed
United Abominations : Return to "Anger"

jeudi 1 juillet 2010

Tous les matins du monde sont sans retour


Hormis le premier album*, je n'ai jamais vraiment aimé Machine Head. The Blackening n'a pas fait exception à la règle : des bouts thrashouillards super efficaces noyés dans des breaks hardcore qui viennent tout ruiner - il en va du thrash comme du reste et trop de mélange, ça tue les couleurs. Ceci étant, Robb Flynn est un personnage que j'ai toujours apprécié, une grande gueule à la Anselmo ou à la Zakk Wylde et parfois en proie à la même « clochardisation » physique (ce mec porte les mêmes t-shirts depuis quinze ans ; celui orné d'un as de pique/tête de mort doit, à mon avis, tenir tout seul une fois posé dans un coin), qui se ressent aussi dans son metal.

Objet de cette notule et grand moment d'exhibitionnisme artistique, le touchant hommage rendu par Flynn à Debbie Abono, brièvement mentionnée dans une notule précédente. Personnage étonnant que cette vieille dame de quatre-vingts ans, ancienne institutrice, qui connaissait de près ou de loin tous les thrashers de la baie - et pour cause, puisqu'elle avait été notamment manager de Forbidden, Vio-Lence, et plus ou moins découvreuse de Possessed. Décédée récemment, c'est pour elle, peut-être plus encore que pour Dio, que Flynn a enregistré cette reprise magnifique et dépouillée de Die Young (Black Sabbath).

* Où en serait aujourd'hui le metal américain sans Far Beyond Driven, Burn My Eyes et Demanufacture, qui ont, contre toutes modes, contre tout diktat, permis au genre de continuer à exister médiatiquement durant les années quatre-vingt dix ?

Ok, we all know Die Young, one of the many Dio-era Black Sab' classics. So here's an oblique, soulful take on it, as performed by Robb Flynn in his new garden (that's right - he said so in the 'Ead official website). Sure we can have a laugh at pretty much everything, and that home video sometimes looks like a shampoo ad. But hey, come on, apart from bullshitting, this homage to both Debbie Abono and Dio is a truly sincere and moving one - and besides, I've always liked Robb Flynn. Way more than Machine Head.

...et toujours :Vio-lence : du bon thrash qui tâche (pistache)

samedi 19 juin 2010

Watain, what else ?


Sworn to the Dark avait fait son effet en 2007 : la sainte-trinité cradoque et peinturlurée d'Uppsala, outre un don certain pour les travaux pratiques (voir l'attirail scénique), avait su policer son metal noir via une profondeur mélodique inédite et l'éloignant, c'est vrai, des cryptes et autres transis parfois monodimensionnels du black metal. Et malgré le fracas des chroniques positives, le consensus n'était pas au rendez-vous. Principal reproche (que je ne partage pas) : un côté Dissection trop prononcé. Et c'est vrai que Watain était alors, comme la femme de Cassavetes, sous influence : difficile de ne pas voir son metal teinté par le négativisme de Jon Nödtveidt lorsque l'on a ouvert pour la tournée Reinkaos et que l'on a, dans le cas de E, tenu la basse et réalisé des artworks pour Dissection.

Arrive Lawless Darkness, et quelle tarte tatin avec lui ! Fin dans sa brutalité, chaotique mais compréhensible, glacial tout en exhalant cette poussière cryptique garantie par le Necromorbus Studio, cet album est à mon avis le vrai tournant de leur carrière. Où se loge sa magie ? Dans cette mélopée constante et bruitiste, contrastée par ses accents heavy metal ? Dans le sempiternel de ses fondations rythmiques, artifice classique du style, agrémentées d'un riffing acéré comme jamais et décliné en de longs mouvements ? De Reaping Death, tuerie norvégienne commise par ces suédois et agrémentée d'un solo slayerien, à Total Death, berceuse dont on doit la prose primesautière à Helmkamp (Angelcorpse), en passant par l'égotique Wolves Curse, Lawless Darkness fait en tout cas ce qu'on lui demande : il ravage l'auditeur comme la syphilis ravageait la peau des femmes d'Henry VIII. Reste à mentionner la dernière piste (j'omets la reprise de Death SS qui jure avec le reste) : Waters of Ain et son ambiance « océan de mercure extraterrestre », distillant une furie peu à peu entamée par l'Entropie dont nous parle Watain depuis son premier album. Ou quinze minutes d'une habile montée en puissance, ponctuée par Carl McCoy de Fields of the Nephilim. On atteint le Beau sans le vouloir, paraît-il : Waters of Ain est le fermoir idéal de l'œuvre - peut-être pas un nouvel Inno A Satana, mais celui de Watain, c'est certain ! J'hésite à émettre un reproche qui concernerait la longueur de l'album, car Lawless Darkness a besoin de prendre son temps pour étendre ses ailes noires et décharnées. Est-il utile de rappeler qu'il s'écoute, comme tout grand album de black metal, au casque et loin du monde ?

Je ne vois pas par quelle magie noire les suédois pourraient pousser cette formule plus loin : Lawless Darkness est l'alpha et l'omega du black metal, en 2010 et pour quelques années à venir. Il faudra faire autre chose, et Watain est assez intelligent pour l'avoir compris au moment où il gravait ce requiem dans la granit du Necromorbus. La couronne de meilleur album black metal de l'année vient d'être ravie (presque) sans effort au nez et à la barbe d'Arckanum, que j'avais pourtant adoubé dans une notule dithyrambique. Enfin, et qualité non négligeable du groupe, Watain a le don comique de faire sortir du bois, à chaque sortie, tous les trous du kulte numériques de France et de Navarre : les forums des « gens qui savent » sont, actuellement, un délice à parcourir.

Sworn to the Dark did sell well, but the Watain guys stand by their old wardrobes and did not change anything as far as their appearance is concerned. Meaning, they still attach dead fuckin’ rats around their skinny necks. Rad, isn’t it ? Fuck, I want one, too. Music-wise, this is a whole other story, and I’m not sure I want to tell it here. Yeah, I’m afraid you’ll have to buy it. What I can say though, ‘cause I hear you insisting on here, is that Watain lost its Dissection-coloured edge characterizing the last album. More accurately, Watain did trade it for its own blades, rediscovering and, well, refining its identity along the way. Sure, they're not dwelling anymore underneath the underground. Sure, this is a bit more harmless, a bit less dirty and dusty. But still it reeks of rotten carrion and still it will blow your ass up ! So although more melodic and thrashier, Lawless Darkness is, I really do believe it, an instant classic. Energized with fist-pumping, heavy metal-inspired chorus and riffage, adorned in a stunning (not shitting you) digipack enhanced with over-the-top sinister artwork – not your classic fuckin’ Gustave Doré rip-off -, Lawless Darkness is a monstrous killing machine, ravaging and destroying everything with its melodic yet hyper-violent brand of black metal. As always, do not believe what you can read everywhere on the net – Watain is making it, without faking it. Now fetch all the rats saying otherwise, tie ‘em by their tails, sing Mütiilation’s “Rattenkönig”, and just eat ‘em up. This is my version of our French “La Souris Verte” song.

Lawless Darkness (Season Of Mist, 2010)

01 Death's Cold Dark

02 Malfeitor
03 Reaping Death
04 Four Thrones
05 Wolves Curse
06 Lawless Darkness
07 Total Funeral
08 Hymn to Qayin
09 Kiss of Death
10 Waters of Ain
11 Chains of Death

Le site et le Myspace de Watain.

vendredi 11 juin 2010

Soldiers of Infortune, Ou Comment Bolt Thrower Peut Sauver Une Soirée Qui Avait Pourtant Fort Mal Débuté


L'avalanche de groupes mêchus et ripolinés, squattant les pages de news de Terrorizer, a tendance à m'irriter fortement. Pourquoi continue-je à lire ces pages, je ne sais... Aucun feeling, un son tellement synthétique que même le menton des frères Bogdanov fait plus naturel, des artworks plus photoshoppés qu'Arielle Dombasle... Et ces noms, mes aïeux ! Ces noms... A coucher dehors avec un billet de logement. D'ailleurs, c'est pas des noms, c'est des phrases. Through the Eyes of the Dead, Bleed From Within, The Dead Lay Waiting (putain ils sont affreux eux), Annotations of an Autopsy, Success Will Write Apocalypse Across the Sky (vous voulez vraiment un commentaire ?), The Eyes of A Traitor... Argh !

Posant mon Terrorizer, je rejoins ma moitié en train de s'abrutir devant un célèbre télé-crochu de M6. Après une première déception (Virginie Guilhaume est en pantalon), je constate avec une affliction résignée que désormais, le dernier des bobos gesticulant dans cette chose télévisée se sent obligé de faire la manu cornuta dès que l'ombre d'une rachitique guitare électrique se profile (en fait, y'en a même un qui a fait Notre Signe pendant un morceau acoustique. J'ai failli pleurer). Frisant l'apoplexie après tant d'agressions, dépossédé, après une énième « corne du diable » sur du William Baldé, de tout ce qui fait de moi ce que je suis (c'est-à-dire un vieux con aigri, tout de suite), je pose un regard torve non pas sur Virginie Guilhaume, mais sur le CD qui traîne à côté de mes Kinder Pingui. Bolt Thrower, Mercenary. Un mot pour le titre de l'album, deux pour le patronyme (pour moi c'est suffisant) et trois secondes pour mettre les écouteurs : Annotations of an Autopsy n'a jamais existé. Les Betraying the Martyrs ne sont pas français (oui, moi aussi, parfois, y'a des choses dans ce pays qui me font honte). La compilation Masters of Brutality III va sortir un jour. La Nouvelle Tare perd toute sa nocuité et Ramon peut bien faire les cornes du diable à Philippe Manœuvre, je m'en fous : ils sont tous « zeroed », comme s'intitule la première piste de Mercenary.

Délaissant ma mie pour mon death metal (comme souvent), je me vautre dans le groove mid-tempo de Bolt Thrower. Je m'abandonne à ce cassage de tête britannique, le plus gros depuis la guerre de Cent Ans, qui n'est plus reconnu à sa juste valeur (malgré un héritage qui prend de l'importance, cf Amon Amarth ou Heaven Shall Burn). Je scrute interminablement cette jaquette signée Peter Archer, qui sortit quelque peu Bolt Thrower de son injustement réductrice réputation de « groupe à Games Workshop » (pour information, la vignette ci-dessus n'est pas l'illustration qui orne ce très sous-estimé Mercenary). Je me repais des lents mouvements de la musique des Bolters, pilonnés par une batterie inexorable, et de ces mélodies étirées, épico-sinistres qui terminent systématiquement les phrases rythmiques. La musique de Bolt Thrower adoucit les mœurs : Annotations of an Autopsy peut exister. Ramon a le droit de faire les cornes pendant une bossa nova. Philippe Manœuvre a simplement oublié de mentionner Ronnie James pendant l'émission. Je vais vraiment rester devant la Nouvelle Tare. Mais avec mes écouteurs. Et après Sixth Chapter, j'insèrerai dans cette antiquité nommée discman l'album suivant, Honour - Valour - Pride. Et tout ira bien.

Fuck, what an incredibly-lame-evening. I just can’t stand anymore all those new dumbass, lengthy, deathcore (fuck me) bandnames. And my eyes can’t bear either the sight of their often atrociously photoshopped artworks. Fuck, I know my English is often Engrish, but only Balinese syntho-gay-metal acts should be allowed to call themselves Success Will Write Apocalypse Across the Sky (what the fuckin’ fuck ?!?). To answer your question, no, I don’t have listen to it and I won’t. So throwing away my Terrorizer I decide to watch fuckin’ French Idol (yeah I know, what the fuck is Sheol doing here – I don’t even know myself). Seeing some fucktards on that retarded show throwing horns without ever knowing about Ronnie Dio was too much and I grabbed my MP3 player and abandoned myself to the chaotic music of the Warmasters themselves – namely Bolt Fucking Thrower. Mercenary is a really strong and underrated album and, last but not least, it really saved my incredibly-lame-evening !!! But that was a close call and I just feel like saying "fuck" another time. Fuck.

Bolt Thrower - Mercenary (Metal Blade 1998)

01 Zeroed
02 Laid To Waste
03 Return From Chaos
04 Mercenary
05 To The Last...
06 Powder Burns
07 Behind Enemy Lines
08 No Guts, No Glory
09 Sixth Chapter

Le
site et le Myspace de Bolt Thrower.

vendredi 21 mai 2010

Sicut Cadaver

The Apotheosis of War (Vasily Vereshchagin, 1871)

En 2010, malgré le marasme socio-économico-professionnel que nous connaissons, il en est une qui ne connaît pas la crise : si je la rencontre, ce ne sera pas, c'est sûr, dans le cadre de mon boulot. Elle fauche la scène, comme la grêle les blés. Après Peter Steele et notre vieux Ronnie (qui a connu les honneurs du canard local), après Debbie Abono (soutière du metal qui choisit, à l'âge où une dame prend censément sa retraite, de manager Exodus, Possessed et Vio-Lence) et quelques autres, voici que c'est Juhani Palomäki qui casse sa pipe (pas une news sur ce torche-cul qu'est Blabbermouth). Trente-deux ans, c'est jeune, c'est moins de moitié moins que Ronnie et je ne parle pas de l'âge canonique de Madame Abono. Cause non révélée (entre le suicide, le sida et la combustion spontanée, j'opte raisonnablement pour la première), mais effet déjà connu : un énorme coup de vieux dans les dents. Voici bien plus d'une bonne dizaine d'années que j'avais eu la chance de voir Yearning en concert avec Nightfall et SUP, et l'occasion de baragouiner quelques instants avec l'alors très jeune - mais moins que moi - chanteur-guitariste.

Yearning a sorti plusieurs albums et marcha plutôt bien en France, malgré le profil bas que s'est toujours imposé ce projet musical - difficile de parler de groupe. Parmi desdits albums, je recommande humblement With Tragedies Adorned, qui fait partie de la bande-son de mon adolescence, mais surtout Plaintive Scenes. Un album important dans la (re)construction de mes goûts, lorsque je suis passé du tout-américain aux genres et groupes plus confidentiels et « exotiques », fussent-ils du sud (Moonspell) ou du nord (Emperor). Et un disque que j'ai associé pour toujours, de façon incongrue vu son origine, à une traversée nocturne de l'Espagne. Seul éveillé dans un bus tout entier endormi filant vers Porto, mon amie d'alors calée à côté de moi, j'avais écouté en boucle ce chef-d'œuvre qui répondait à tout ce romantisme adolescent que j'avais au fond de moi. Je ne suis peut-être plus ni l'un, ni l'autre... mais amateur de Yearning, toujours. Salut l'artiste, tu es mort jeune, mais tu as fait beaucoup.

Naïveté de Yearning, le seul groupe finlandais qui savait utiliser les trémas et accents aigus dans son français.

What a sad year 2010 is – and a busy one for the reaper. Pete Steele, Ronnie Dio, Debbie Abono (an almost unknown figure whose role in the rise of American west coast thrash metal was an important one), the ‘Knot Paul Gray and other lesser-known people… It seems that wasn’t fuckin’ enough ‘cause now it’s young Juhani Palomäki’s turn to be swallowed into the void. What a pity – Yearning was a talented band criminally underrated ! Despite having never “made it” on the American market, Yearning did pretty well in Europe and especially France. I highly recommend Plaintive Scenes, the second release, which sums up everything that Yearning was : melodic yet heavy as fuck, while retaining an atmospheric and romantic touch which I call the “Finland style”. Sadly, the death of its founding member and mastermind is also the demise of Yearning.

mardi 11 mai 2010

October Dust

Pas forcément dingue de sa musique tout en reconnaissant largement ce qu'elle a apporté à notre scène (beaucoup), mais inconditionnel du bonhomme en lui-même : tel était mon rapport avec Peter Steele, qui a décidé non pas de claquer par un mois d'octobre un peu rouillé mais plutôt un bête jour d'avril 2010. La vie est conne, il le savait, nous le savons, vous le savez. La multiplication des hommages par des musiciens de tout horizon fut aussi impressionnante que celle des pains par le Christ et Peter Steele se serait contrefiché du mien autant que des autres. J'ai donc décidé, après concertation avec moi-même (nous sommes souvent d'accord), que le mieux était de lui laisser la parole une dernière fois. La sagesse de cet homme, féministe de la première heure qui disputa la guerre des « gaules » à César, était biblique - ainsi en attestent ses fulgurances post-sartriennes et autres considérations situationnistes (notamment sur la Femme et sa place - à Brooklin comme ailleurs, y'a une cuisine dans chaque maison). Enjoy, comme ils disent... :

« - You say I'm a pussy - Well I say you're what you eat

- I used to try to run five miles every other day, but I was subjected to my own thoughts for forty minutes and I couldn't stand what I thought

- I'm a big fan of the effects of alcohol

- I don't cry anymore, I just beat people up. It's a lot more fun

- Words as slut, cunt, whore, are not directed to the entire female populus : there is no better person in this world than my mother

- I don't hate women ; I hate all people equally ».


Enfin, profitons de ce billet pour une exhumation (pas celle de Peter - ça a déjà du être assez compliqué comme ça pour le mettre en boîte). Fallout, c'était le premier groupe de l'escogriffe, et il est amusant de remarquer que la plupart des choses qui allaient être développées dans Type O Negative étaient déjà là : l'humour noir, ce côté punk esthétisant assaisonné de claviers léthargiques, et cette prestance déglinguée qui devait autant au doom de Black Sabbath qu'aux substances du dealer d'en face. Josh "Taupe au Guichet" Silver jouait déjà dans ce groupe mais l'histoire ne dit pas s'il était déjà constipé (avez-vous vu ce mec essayer désespérément de chier dans un champ, dans une home video plus tordante qu'un Seinfeld ?). Pour un bête groupe de heavy metal (pléonasme), Fallout devait être plus intéressant qu'il n'y paraissait et, passée la parenthèse ignominieuse - c'est un compliment - Carnivore, Type O en fut la directe continuation. Où la preuve, une fois de plus, que rien ne pousse bien sans bonnes racines. Sur ce, laissons Peter à celles des pissenlits...

Batteries Not Included et Rock Hard, enregistrées en 1981 par Fallout.

Not wanting to sound like a pussy, but I have to admit that Pete Steele’s passing did affect me a bit – it just saddened me, really. Typo O really never was my thing but Steele was a bigger-than-life character blessed with a twisted, metal Woody Allen kind of humor – and it makes each one of his interviews absolutely priceless. As I know you like to learn things here, you can say Pete was a “pince-sans-rire” (a French idiomatic expression). One day his quotes will be compiled in a compendium and our children would have to learn it. Wouldn’t that be überkult ? By the way, Fallout is not only a video-game. It is also Pete’s pre-Carnivore band, foreshadowing in many ways the TON stuff. Give it a try instead of listening to Christian Woman for the hundredth time !!!

dimanche 11 avril 2010

A ma gauche...

Tom G. Fischer - ou plutôt Warrior à nouveau, tel qu'il apparaît dans les crédits de Eparistera Daimones - est un personnage duel, tantôt posé et réfléchi, tantôt poseur et péremptoire. Un fond de masochisme (et un penchant inavouable pour son style d'écriture) me pousse à lire régulièrement son journal. Sentencieux et d'une gravité affectée souvent irritante, son épanchement prosaïque demeure intéressant pour qui apprécie l'art du musicien, et c'est mon cas. Je pardonne finalement beaucoup à Tom G. Fischer, tout en continuant de m'étonner de l'extraordinaire blanc-seing dont il bénéficie après des années passées à renier sinon mépriser le genre qu'il a contribué à créer - avant d'y revenir tel un mythique père fondateur, acclamé et révéré par la marmaille infernale qu'il a enfanté. Triptykon me contraint à prolonger cette mansuétude, car le tout récent Eparistera Daimones n'est pas une réussite, ni même un bon album : c'est un instant classic, un chef-d'œuvre qui prolonge directement la nuit commencée par Monotheist sans pour autant être lui être redondant.

Beaucoup plus dense et ramassé, moins expérimental, cet album est majoritairement constitué d'un thrash noirci dans les flammes de l'enfer et parcouru de soubresauts doom rappelant fréquemment les plus grandes heures de Paradise Lost - un juste retour des choses, finalement, pour boucler la boucle. Simone Vollenweider est toujours là, ainsi que ce feeling goth très allemand dont le Frost (et Triptykon) ne se départira jamais. Tom G. Warrior ne tombe dans aucun des panneaux qui émaillaient sa presque nouvelle route, et parvient à réaliser le tour de force de n'être jamais là où on l'attend tout en y étant très exactement ; c'est à peine si l'on notera un « ough ! » au beau milieu d'un morceau. Je ne suis pas assez musicien pour m'éterniser de façon objective sur Eparistera Daimones. Je sais simplement que cet album est la meilleure chose que j'ai entendue, dans son genre et bien plus encore, depuis, allez, 2006 et un certain Monotheist. S'il vous faut tuer pour l'avoir, faites-le ! Y'a beaucoup de place à gauche, en ce moment.

Holding Eparistera Daimones in my tiny, greasy little hands, idly barking at the moon, I can’t help but thinking how a good thing it was to finally put the Frost at rest. I can’t see any satisfying evolution after Monotheist, except a probably redundant Monotheist pt. II. The demise of Celtic Frost finally allowed Tom G. Fischer to create a new, valid vehicle to his art and Triptykon’s debut is a solid, black-as-the-night SOB : less opaque and experimental, more guitar-oriented, this is blackened-thrash metal the way it should be, nothing more, nothing less. Exhaling a discreet goth touch, Eparistera Daimones sometimes brings forth memories of Paradise Lost’s greatest hours, while avoiding the genre-traps and too frequent nods to the Frost. Ough !

samedi 10 avril 2010

...les démons.

Varg Vikernes vient de faire paraître Belus, dernier album qui, s'il est l'anagramme de blues, donne pourtant dans le black metal naturaliste, mélodique et monotone qu'on lui connaît (et en cela pourrait clore une trilogie commencée avec Hvis Lyset Tar Oss et Filosofem). Malgré les récents dires du sieur qui souhaitait s'éloigner du metal, des guitares et du folklore y étant associé (car tout cela, comprenez-vous, ça vient du rock, ça vient du blues... et je vous laisse terminer la réflexion de Varg Vikernes), Belus revient... au metal, aux guitares et au folklore associé. On laissera donc Vikernes à ses paradoxes ; cela ne nous empêche pas d'apprécier Belus qui alterne entre le très bon et le moyen, mais, à tout le moins, le résultat s'avère bien supérieur à ce à quoi je m'attendais. Le son est très bon et j'en ai marre de lire des énormités comme « la production est nulle, on est en 2010 » : le black metal tel que le pratique / conçoit Burzum se satisfait amplement d'une production calamiteuse et d'une batterie qui sonne comme mes casseroles. Et d'ailleurs, on n'est pas en 2010, mais en 1993.

Changement de taille à signaler, qui enlève à Burzum une partie de son identité : la voix, méconnaissable, s'est malheureusement standardisée et un feulement typiquement black metal norvégien, rappelant parfois de vieux Darkthrone, remplace la voix déchirée sans laquelle War ne serait qu'un morceau médiocre. Si Tom G. Warrior, dans l'album de Triptykon, a astucieusement évité la facilité, Varg Vikernes (oubliez le comte, il est mort en prison) s'y vautre en revanche pendant la vingtaine de minutes qui clôt l'album : Morgenrøde et Belus' Tilbakekomst (Konklusjon) sont une tentative de retrouver l'esprit de désolation quasi rituel (basé sur la répétition) qui caractérisait la meilleure époque du musicien, mais virent rapidement à l'auto-parodie chiante - dommage. A l'inverse, le début de l'album est franchement excellent et, reconnaissons-le, l'ambiance païenne et épique (symbolisée par le marteau de forge qui ouvre Belus) nous scotche pour la suite. Bien mieux que ce que j'en attendais, mais peut certainement mieux faire, en somme.

Man, the new Burzum is out (as is Varg Vikernes). The name’s Belus and believe me, this is quite a nasty motherfucker harking back to Burzum’s early naturalism – you’ll think about Filosofem more than once. Of course time has passed and so has Vikernes’ voice : his distinctive and distorted painful shriek isn’t there anymore and Belus sports an average, common black metal singing. After the initial enthusiasm, one would regret the boring, déjà-vu conclusion and hope for even more next time but after all, who would have bet on the new Burzum cd one year ago ?

Le site et le Myspace de Burzum.

dimanche 4 avril 2010

Gods of War (Interview Rotting Christ)

Cette entrée sera l'occasion d'inaugurer une nouvelle catégorie, celle des interviews - il ne coûte rien de demander aux artistes quelques éclaircissements sur leurs ténèbres. Et il ne leur coûte pas plus cher de répondre (sauf à Vreid !). Un petit mail à l'adresse de Sakis Tolis aura suffi et c'est avec une grande cordialité que le chanteur-guitariste-compositeur de Rotting Christ s'est prêté au jeu. Un personnage charismatique et attachant, qui donne du brother à tour de bras dans ses mails, mais surtout un « faiseur » dévoué à son art, qui parle avec passion de Aealo, digne successeur de Theogonia, de son pays et de musique au sens large du terme. Je profite de ce préambule pour le remercier car on peut dire que sa diligence à me répondre fut égale à sa sympathie. Many thanks Sakis - keep on creating. Here's to you !

Sh - Nous entendons beaucoup parler, ces derniers temps, de la situation économique et sociale de ton pays. Y a-t-il un degré de lecture « sociétal » derrière la noirceur de vos morceaux ? Je pense notamment à Primordial, un groupe qui travaille beaucoup ce niveau de lecture pour qui sait lire entre les lignes. Penses-tu avoir à endosser un tel rôle en tant qu'artiste ?

Sa - En tant qu'individu je m'intéresse à la situation politique mondiale, et en tant que citoyen à part entière j'aime à penser que j'ai une opinion qui compte. Et aujourd'hui particulièrement, au sortir de cette crise financière qui a frappé mon pays, je suis de plus en plus actif - c'est de notre qualité de vie qu'il est question. Mais ce n'est pas quelque chose que j'exprime par ma musique car la création artistique est ce qui nous permet d'échapper à tout ceci. Le metal a été inventé pour s'échapper du monde et non pour le changer. Je me sens chanceux d'avoir cette possibilité via mon groupe. Il n'est pas toujours bon de voir les choses trop sérieusement - tôt ou tard on deviendrait fou !

Sh - Parlons musique. Écoutes-tu toujours du black metal « pur et dur », notamment celui de la deuxième vague du genre (dont Rotting Christ est issu) ?

Sa - Absolument. J'écoute toujours les hordes issues de la deuxième génération du black metal et j'essaie de me tenir au courant de ce qu'il se passe sur la scène metal / black metal actuelle. Je continue de me considérer comme faisant partie de l'underground.

Sh - Rotting Christ est né d'une scène à mon sens unique : l'écurie Century Media des années quatre-vingt-dix (Samael, Tiamat, Moonspell, The Gathering...). Es-tu conscient, plus d'une décennie plus tard, de l'importance de cette scène ? Comment expliquer ce parfum occulte, « magique » qui imprègne tous ces grands albums que sont Wildhoney, Ceremony of Opposites, A Dead Poem, Mandylion, Wolfheart (j'ai tendance à y voir un dénominateur commun nommé Waldemar Sorychta) ?

Sa - Je me rends compte, évidemment, de l'importance de cette scène car elle a été annonciatrice de courants qui ont dominé plus tard. Alors certes, des choses auraient pu être faites autrement, mais n'oublions pas que nous étions au milieu des années quatre-vingt-dix... L'époque la plus anti-metal de toute l'histoire de cette musique !

Sh - Rotting Christ est un groupe multi-facettes, qui a fait montre d'une grande diversité stylistique tout en conservant cette patte immédiatement reconnaissable. Cependant penses-tu que le futur peut réserver des initiatives surprenantes, du genre album acoustique ou de reprises ?

Sa - Rotting Christ est d'un tempérament anxieux, toujours en recherche de nouvelles voies à explorer. Je ne sais pas si nous y parvenons mais au moins nous essayons. Chaque album est l'expression du côté le plus sombre de notre âme et par conséquent vous pouvez vous attendre à tout de notre part, tant que nous restons fidèles à nos racines obscures et apocryphes.

Sh - Une question très terre-à-terre : je sais que cela a pu être le cas par le passé, mais vivez-vous, en 2010, de Rotting Christ ?

Sa - Après deux décennies, le travail du groupe nous permet enfin de dégager de quoi vivre mais nous avons malgré tout besoin, de temps à autre, d'un job en parallèle : jouer dans un groupe ne t'apportera pas la sécurité financière. Et en particulier quand ça concerne des personnes comme nous, que je qualifierais de romantiques et d'idéalistes... Ca signifie que nous avons perdu un paquet de thunes dans notre vie mais enfin... l'argent n'est pas l'essentiel, n'est-ce pas ?

Sh - Depuis Theogonia, le son de Rotting Christ s'est fait plus épique et majestueux tout en retrouvant, à mon sens, le côté ténébreux qui caractérisait vos débuts. Penses-tu avoir totalement exploré l'identité actuelle du groupe avec les deux derniers albums, ce qui laisse à penser que le prochain serait le début d'un nouveau cycle (traditionnellement les périodes du groupe sont constituées d'une paire : Triarchy.../A Dead Poem, Sleep of.../Khronos, Genesis/Sanctus Diavolo, Theogonia/Aealo) ?

Sa - Je pense que nous sommes sur la bonne voie. Nous sommes actuellement dans notre troisième période artistique, une période plus influencée par l'histoire antique et qui nous donne ce son un peu plus « ethnique », tout en restant occulte et plus metal que jamais. J'ai l'impression qu'en tant que musiciens, c'est notre meilleure époque. Quant à savoir si, avec Aealo, nous en avons terminé avec cette période... La réponse viendra de mon esprit, dans quelque temps, quand j'aurais commencé à réfléchir à mes angoisses (NdSheol : lorsque la composition du prochain album aura commencé, donc). Pour l'instant je suis plus polarisé sur des aspects plus terre-à-terre, et notamment la préparation de la tournée mondiale.

Sh - J'apprécie beaucoup, sur Aealo, les interventions de l'ensemble Pleiades (ces lamentations traditionnelles quelque peu sinistres). Ces polyphonies me rappellent notamment le travail de Kenji Kawai sur la bande-son de Ghost in the Shell. Connais-tu ce musicien ?

Sa - J'aime découvrir d'autres musiques du monde... Celles qui ne proviennent pas forcément des civilisations connues, mais d'origines plus obscures. Et j'adore apprendre des gens qui créent : c'est pour cela que j'ai intégré le choeur Pleiades à l'album. Cet ensemble polyphonique grec est spécialisé dans les lamentations, un genre qui a ses racines dans la Grèce ancienne. Je crois qu'il existe, sur ce globe, des genres musicaux qui s'accordent bien avec les atmosphères que le dark metal peut créer. Je connais le travail de Kenji Kawai et je l'apprécie beaucoup, même si je n'y vois pas de point commun avec les Pleiades. Peut-être ce feeling polyphonique... mais rien d'autre (NdSheol : c'était donc la question conne de l'interview !).

Sh - Peux-tu m'éclairer sur le processus d'écriture de Rotting Christ, notamment au vu du côté « multi-texturé » des deux derniers albums ? De façon générale, tu commences par les paroles ou la musique ?

Sa - La musique me vient en premier : j'essaie ensuite d'y adapter des paroles. La façon d'écrire est quelque chose d'important pour Rotting Christ, et étant, a fortiori, le seul impliqué dans ce processus, je peux dire que c'est, de façon générale, un aspect important de ma vie. Si je ne créais pas je me sentirais vidé, c'est une profonde dépression qui me guetterait. Voilà pourquoi j'attache tant d'importance au song-writing : parfois je suis tellement obnubilé par mes idées que j'en deviens insomniaque. Je m'implique toujours énormément dans ce rôle, comme ce fut le cas pour le dernier album - tu sais, je me suis vraiment cru au beau milieu d'un champ de bataille pendant un bon bout de temps !

Sh - Quel est le dernier album de metal que tu aies adoré (et que tu écoutes encore) ?

Sa - J'ai beaucoup aimé le dernier Burzum... Belus... Un album vraiment old-school.

Sh - Le nom Rotting Christ dissimule bien plus de sens qu'il n'y parait : c'est un véritable sigillé, doublé d'une profession de foi contre les dogmes préétablis et l'étroitesse d'esprit à laquelle est confrontée la scène dite « extrême ». Mais c'est aussi - évidemment - une épine dans le pied du groupe (cf le problème avec Dave Mustaine). N'est-ce pas un suicide commercial permanent que de s'appeler ainsi ? Rotting Christ a-t-il jamais pensé, au fil de sa longue carrière, à se débaptiser ?

Sa - Il est évident que c'est une épine dans notre pied, un patronyme qui nous a fermé beaucoup de portes... C'est peut-être un suicide commercial mais sincèrement « mieux vaut régner en enfer que servir au paradis » (NdSheol : une citation de Milton). C'est le metal mon frère et nos rêves n'ont rien à voir avec une externalisation de notre ego. Metal on metal !

Sakis, au nom de Rotting Christ.

Sh - We recently heard a lot, in the news, about Greece's economico-social situation. Is there a level of social-consciousness beneath the darkness of your songs ? I'm thinking about Primordial, a band which makes statements about our world's state for whom can read between the lines. Do you believe you have that kind of role, as an artist ?

Sa - As an individual, I am really into these political situations that take part worldwide. I am an active society member and I want to believe that I have an opinion for everything that matters. Especially now, after the current financial crisis that hit our country I am getting more and more active, it simply has to do with the quality of our life. But it's something that I never express through my music cause creating art is the only way to escape from all that happens everyday. Metal was invented for this and not to change the world. I feel lucky that I have this opportunity with my band. It is not that good to see all things so serious. Sooner or later you will get crazy !

Sh - Let the music do the talking now. Do you still listen to pure black metal, such as the second-wave black metal from which you rose ?


Sa - Of course I do still listen to all those second generation Black Metal hordes and I am trying to follow as much as possible the current metal scene and Black Metal releases. I still consider myself as a part of underground community.


Sh - Rotting Christ is born of a magical, occult scene : the Century Media stable, with great artists such as Samael, Tiamat, Moonspell, The Gathering... Are you fully aware, more than a decade later, of the importance of that scene ? How would you explain that magic / scent of occultism which infused great records such as Wildhoney, Ceremony of Opposites, A Dead Poem, Mandylion... (I can see a common factor named Waldemar Sorychta) ?


Sa - Of course I am aware of the importance of the scene back then as it was the precursor of some styles that dominated later on. Ok, some things could have been different but do not forget that we were in the middle of 90's... The most anti metal era of Metal history !


Sh - Rotting Christ is a multi-dimensional band, stylistically speaking, which always managed to keep its sound and identity. However, do you think the future can hold some particular initiatives, such as an acoustic album (that would be a blast - don't know why but I'm sure about it), or a cover-album ?


Sa - Rotting Christ is an anxious band, always seeking for new directions. I do not know if we manage to do it but at least we try. Every album is an expression of the darkest side of our soul and you can expect everything from us in the future as long as it is faithful to our dark and apocryphal roots... because Rotting Christ will never sell out.


Sh - A very down-to-earth question : do you make a living out of Rotting Christ ? I know it had been the case in the past but what about now ?


Sa - Finally after two decades we manage to earn our living by playing in a band but even now we are forced to have some alternative jobs cause playing in a band can not ensure you anything financially. Especially when you are persons like we are, which I would call romantic and idealists... That means that we have lost a lot of money in our life - but money is not everything in this world. Don't you think ?


Sh - I believe that since Theogonia, Rotting Christ' sound shows a newfound deepness / epic majesty, while rediscovering its initial blackness. Do you think you have fully explored, with the last two albums, the current identity of Rotting Christ ? Will the next album be the beginning of a new cycle (as I believe Rotting Christ's periods are often defined by pairs of album : Triarchy...&A Dead Poem, Sleep of...&Khronos, Genesis&Sanctus Diavolo, Theogonia&Aealo) ?

Sa - I think that we are in the right way. We are currently crossing our third period as a band, a period more influenced by ancient history and making the band sounding a little bit ethnic but still occult and more Metal than ever. I feel this is the best season we are covering, as a band. I do not know if with Aealo we ended up this period... My soul will say the truth in some time, when I will start philosophize my anxieties. For the moment I am more concentrated in down-to-earth things like preparing our worldwide tour.


Sh - I am really enjoying the eerie, beautiful lamentations performed by the Pleiades choir throughout Aealo ! I'd like to point out that these polyphonies remind me some of Kenji Kawai's work (specifically the Ghost in the Shell soundtrack). Do you know him / his music ?


Sa - I am really into searching ethnic music... Music not coming from knowed-civilisations but from more « underground » places. I love to learn from people that create. This is the reason why I did incorporate the Pleiades. This Greek polyphonic choir is specialized in lament songs that have their musical roots back in ancient Greek. I think there is music around this globe that fits well with the dark atmosphere that Dark Metal can create. I am aware of Kenji Kawai's work and find it great even if I think that it doesn't sound like Pleiades. Maybe the polyphonic feeling... Nothing else...


Sh - What about the songwriting process in Rotting Christ, especially given the multilayered textures featured in your last albums ? And what comes first - the music or the lyrics ?


Sa - Music comes first and I am trying to adapt the lyrics to it. Song-writing process is an important thing in Rotting Christ, and being the only one involved in it, I can say that it is an overall important part of my life. If I was not creating I would feel empty and would fall in a deep depression. So I take this process really seriously and some ideas are stuck so much in my mind that I hardly can sleep for a long period of time. I am always getting into that role very deeply ; as I did with the last album - thinking for a long time that I was in the middle of a battlefield. Man...I believed it !!!


Sh - What is the last metal album you really loved and still listen to ?


Sa - I liked Burzum's last album... Belus... A really oldschool outcome.

Sh - The name Rotting Christ is more to the eyes than it seems : it is a true sigil, a statement against dogmas and narrow-mindedness. However it can also be a thorn in your side (we know about the, well, Mustaine problem). Isn't that name a permanent commercial suicide ? Have you ever thought, in Rotting Christ's extended career, about changing your band's name ?


Sa - Of course it is a thorn in our side which has closed many doors for us... It might be a commercial suicide but to be honest we prefer to rule in hell instead of serve in heaven. This is Metal bro, and our dreams have nothing to do with any ego externalisation. Metal on Metal !
Sakis, on behalf of Rotting Christ.


Aealo (Season of Mist, 2010)

01 Aealo
02 Eon Aenaos
03 Demonon Vrosis
04 Noctis Era
05 dub-sag-ta-ke
06 Fire Death and Fear
07 Nekron Iahes...
08 ...Pir Threontai
09 Thou Art Lord
10 Santa Muerte
11 Orders from the Dead

Le site et le Myspace de Rotting Christ.

...et toujours :
Hellénique ta mère